Le Rouillon: les égouts dans l’école

Article paru sur le Blog de Saint-Denis. Toutes les photos ont été prises le 28/01/25, 4 mois après le dernier refoulement.

Depuis la rentrée, l’école maternelle du Rouillon est polluée par les égouts. Un défaut d’entretien a entraîné la panne d’une pompe de relevage, alors que le rez-de-jardin de l’école – son niveau principal, qui regroupe les salles de classe et l’accueil de loisirs des petits – se trouve en dessous du niveau de la rivière du Rouillon.

Le rez-de chaussée avec l’accueil de loisirs et la cour, le rez-de-jardin dans le creux en dessous du niveau du sol.

Avec les pluies torrentielles de septembre et octobre, les égouts, qui de surcroît étaient sous-dimensionnés et dont l’entretien laissait également à désirer, n’ont plus pu assurer l’évacuation des eaux pluviales et des eaux usées.

Résultat ? Une première inondation du niveau rez-de-jardin (classes et accueil de loisirs des petits) la semaine de la rentrée, et 2 jours de « garderie » pour les enfants. Rebelote le 9 octobre, et cette fois-ci plus de classe pendant 10 jours, jusqu’aux vacances. Bouquet final, le 17 octobre, une dernière inondation. L’eau refoulée par les grilles d’évacuation de la cour basse niveau rez-de-jardin est montée les trois fois jusqu’à une petite dizaine de centimètres. L’équipe pédagogique, très engagée, a pu assurer tant bien que mal des activités pour les enfants.

Les grilles d’égout par lesquelles le refoulement a eu lieu.

Pendant 5 mois, les usagers livrés à eux-même

Car c’est l’engagement des usagers qui a dû suppléer à une sorte de paralysie de la Ville. Aujourd’hui encore, l’état des locaux questionne.

Après les sinistres, ce sont les parents et les enseignants qui se retrouvent à organiser le nettoyage, arrachant à la main les plinthes qui empêchaient les cloisons de plâtre de sécher, déplaçant les meubles imbibés d’humidité, enlevant eux-mêmes les matériaux pollués par les eaux sales des égouts.

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Du 9 octobre au 17 octobre, c’est un agent de la Ville, aidé ponctuellement par une mère, qui tentent d’évacuer l’eau avec une raclette… Pas même une pompe, un aspirateur, rien n’est mis à disposition pour assainir au plus vite les locaux, qui se sont dégradés inutilement en baignant dans l’eau stagnante.

L’école a dû faire appel à un mécène privé pour obtenir trois déshumidificateurs. Ce n’est qu’en décembre que la Ville a fourni 3 déshumidificateurs supplémentaires.

Un des déshumidificateurs fournis par la ville en… décembre!

Les enfants déplacés dans la maternelle voisine Saint-Léger sont découverts dormant au sol, alors que des matelas propres étaient disponibles à une centaine de mètre, dans des locaux du Rouillon non inondés.

Des classes du rez-de-jardin insalubre ont été déplacées dans des locaux du centre de loisirs au rez-de-chaussée. Une solution provisoire justifiée par l’urgence, bien que les locaux soient inadaptés par leurs dimensions. Mais pourquoi, 5 mois plus tard, toujours pas de tableaux installés dans ces classes provisoires ? Pourquoi pas l’aménagement de toilettes adaptées à la taille des petits ?

Le dortoir des petits puant la moisissure

À l’entrée du dortoir, une violente odeur de moisissure, venant du mobilier qu’on distingue sur la gauche.

Et surtout, pourquoi 5 mois plus tard les locaux du rez-de-jardin, toujours occupés en partie par les enfants, n’ont pas été intégralement assainis, en attendant les travaux de fond ? Pourtant, certaines parties basses des murs ont bien été reprises afin de les rendre inaccessibles. Mais la plupart restent encore à l’air libre, moisissures apparentes, sans protection, y compris dans plusieurs salles de classe. Dans certains locaux, une forte odeur prend encore à la gorge, témoignant d’une absence de purge des parties atteintes.

Un espace de rangement fixé tout le long du mur est resté en place: la moisissure y a proliféré, débordant de toutes parts, sur ce meuble où sont entreposés les affaires des petits…

Dans le dortoir des petits – toujours utilisé ! –, la partie du mobilier fixée au mur n’a même pas été déplacée, l’humidité s’y est installée, les moisissures s’en échappent, et une puissante odeur malsaine en émane…

Les parents fortement mobilisés

Durant tout ce temps, les parents mènent la bataille. Une mère a publié sur les réseaux sociaux des vidéos très regardées sur le compte Instagram @sauvonslerouillon https://www.instagram.com/sauvonslerouillon/. Le conseil local FCPE et les parents mobilisés se sont démenés, et souvent ils ont eu l’impression que la Ville temporisait, et que ce qui aurait dû être fait en toute urgence ne l’a pas été. Une visite des locaux, certes. Un diagnostic de la structure du bâtiment, aussi. La préparation du chantier présenté ce 28 janvier, certainement. Mais en attendant ? Durant ces 5 mois ? Rien, ou presque. Une impression d’abandon aggravée par les autres dossiers qui n’avancent pas : cour dangereuse car extrêmement glissante en cas de pluie, cantine avec des couverts jetables depuis un an et demi en raison d’une panne de la VMC interdisant de faire fonctionner les machines à laver…

D’un côté, le placoplâtre imbibé d’eau et moisi a été enlevé et une structure protège l’accès à la partie souillée; de l’autre côté, rien.

Plus que 7 mois à tenir ! Et des mesures immédiates promises

Mardi 28 janvier, une réunion avec l’adjoint aux bâtiments a permis enfin d’envisager une issue, avec le déblocage d’une enveloppe de 500 000 €, incluant :

  • la dépollution et la réfection de tous les murs intérieurs souillés ;
  • la reprise des égouts, la réparation de la pompe de relevage, afin de mieux protéger l’école dans le futur ;
  • la modification du revêtement de la cour ;
  • la réparation de la VMC de la cantine ;
  • des mesures immédiates contre les moisissures qui prolifèrent ;
  • spécialement l’assainissement prioritaire du dortoir des petits (les parents seront vigilants sur l’utilisation de produits fongicides potentiellement toxiques dans les locaux accueillant leurs enfants…).

Le gros des travaux se déroulera cet été, entraînant la fermeture de l’accueil de loisirs de tout le groupe scolaire, impactant également les écoles Saint-Léger, Diez et Madigou.

Le mur laissé tel quel, la peinture se décolle, les déchets traînant à terre…

Entretien des écoles : un budget pas à la hauteur

C’est un grand soulagement, bien sûr, et la Ville semble enfin avoir pris la mesure de la situation sur Le Rouillon. Plus généralement, néanmoins, c’est la question de l’entretien courant, de la réactivité en cas de problème, qui reste déterminante. Au Rouillon, si les pompes de relevage avaient été entretenues (l’emplacement de l’une d’entre elles n’a été retrouvé qu’en janvier), en serions-nous arrivés là ? Nous sommes bien loin des engagements de campagne du candidat Hanotin, il y a 5 ans, promettant un « audit annuel des bâtiments et équipements avec le conseil d’école », un « plan pluriannuel d’entretien et de rénovation des écoles », et de « ne pas laisser les petits travaux nuire au bon fonctionnement des écoles »…

L’enveloppe budgétaire est insuffisante, c’est manifeste. La priorité à nos enfants, c’est un choix politique. Il est temps que cette priorité se réalise non dans les paroles mais dans les actes. En raison de la stabilisation démographique, la Ville n’a plus besoin de construire un groupe scolaire à 20 ou 30 millions d’euros par an, comme c’était le cas auparavant. L’entretien doit devenir une vraie priorité quitte à atteindre un effort comparable à celui d’avant : 20 millions d’euros par an, tant que nécessaire, et non 5 millions qui selon l’aveu même de l’adjointe à l’éducation sont largement insuffisants au regard des besoins. Trop de temps a été perdu depuis 5 ans, les témoignages de dégradations dans les écoles se multiplient, classes sans chauffage, infiltrations non traitées depuis des années, locaux insalubres…

Et ce constat insupportable que les parents ne sont entendus que s’ils se mobilisent. Cette difficulté à se faire entendre. Même dans les situations les plus intolérables.

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